Essai comparatif utilitaires électriques Circuler en électrique : une logistique sous tension
Et si l’électrique s’installait dans les exploitations ? La plupart des agriculteurs recourent aux utilitaires diesels pour réaliser environ 10 km par jour. Mais remplir le réservoir de ces derniers devient de plus en plus onéreux. Pour limiter ces dépenses, l’énergie électrique peut être une solution. Afin d’en avoir le cœur net, nous avons mis à l’épreuve, sur une exploitation céréalière de Seine-et-Marne, quatre véhicules équipés de cette technologie et vendus dans l'Hexagone. Retrouvez, le mardi et le mercredi, une étape du déroulement de cet essai comparatif.
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Un raisonnement à l’autonomie
Les constructeurs automobiles proposant des véhicules électriques affichent l’autonomie de conduite et non la consommation du moteur en kWh/100 km.
« La consommation d’un véhicule électrique variant selon des facteurs différents de ceux d’un thermique, l’utilisateur doit raisonner à l’autonomie en kilomètres », annonce Khurram Mansoor, responsable produit chez Peugeot France, lors de la présentation de l’utilitaire de même marque.
L’autonomie annoncée par le constructeur correspond à un parcours mixte, effectué en ville, sur nationale et sur autoroute, selon la norme WLTP.
« Le moteur étant séparé des roues uniquement par un réducteur, lorsque la vitesse du véhicule est élevée, comme sur l’autoroute, le moteur électrique tourne plus vite (jusqu’à 10 000 tr/min) et puise une grande quantité d’énergie à la batterie, ce qui diminue l’autonomie. En revanche, en ville, sa faible rotation réclame moins d'énergie. Lorsque la pédale d’accélérateur n’est pas sollicitée, l’inertie de l’automobile produit de l’énergie qui est directement renvoyée à la batterie, autrement appelée “la régénération”. Dans ce cas-ci, l’autonomie peut s’avérer supérieure à celle qui est annoncée », ajoute-t-il.
Le climat a également un impact sur l’autonomie. La plage d’utilisation optimale d’une batterie se situe entre 0 et 30 °C. Pour qu'elle bénéficie des meilleures conditions thermiques, certains constructeurs prévoient un système de climatisation par fluide caloporteur qui demande de l’énergie.
La batterie : une mer de réactions chimiques
La batterie de traction, de technologie complexe, se compose de plusieurs modules reliés les uns aux autres et contenant chacun des cellules lithium-ion branchées en série ou en parallèle. Ces dernières regroupent trois éléments : deux électrodes et un électrolyte pour la séparation des deux premières, ainsi que pour le passage des ions lithium libérés lors de la réaction chimique. En passant de la cathode à l’anode, ces derniers produisent un courant électrique alimentant le moteur.
La capacité de la batterie à accumuler ou délivrer de l’énergie se mesure en kilowattheures (kWh). Plus cette dernière est élevée, plus l’autonomie du véhicule l'est aussi. Une batterie de 100 kWh de capacité réclamera deux fois plus de cellules qu’une autre de 50 kWh et sera donc plus volumineuse et plus lourde. Une batterie lithium-ion peut emmagasiner de 100 à 250 Wh/kg, là où une batterie au plomb est limitée entre 20 et 40 Wh/kg, et le gazole à 11,86 kWh/kg. La batterie de traction étant placée sous le plancher de l’utilitaire, les capacités et dimensions de ce dernier limitent sa puissance.
Un réseau de recharge léger
Circulant avec un utilitaire électrique, je profite des places de parking réservées aux véhicules dits « zéro émission ». Je me rends à la borne de recharge la plus proche de notre lieu d’essai, à 2 km. Celle-ci ne disposant pas d’un câble de recharge intégré, je prépare celui que le constructeur fournit avec le véhicule. Deux options s’offrent à moi : soit j'utilise une carte RFID dédiée aux recharges électriques, soit je scanne le QR code pour télécharger l’application mobile associée à la borne. J'opte pour le second choix, localise ma borne et active la charge à distance à partir de mon smartphone.
Tout semblait bien se passer, mais la trappe de la borne, par laquelle je m'apprêtais à brancher le câble sur le connecteur dit de « type 2 », ne se déverrouille pas. Heureusement, les réseaux de bornes disposent d’un service d’assistance téléphonique 24 h/24, 7 j/7. Après quelques minutes d'attente, la gentille hôtesse m’annonce que la borne s’est mise en défaut et que je dois me rendre au prochain village, à 5 km, afin de profiter d’une recharge fonctionnelle. Je m’exécute. Une fois sur place, je sélectionne sur l’application mobile le côté de la borne que je souhaite utiliser puis appuie sur « démarrer la charge ».
Je prends soin de noter le code de déverrouillage de la borne. Cela évite à un tiers d’accéder à ma charge. La trappe se déverrouille, je branche le plus petit connecteur de type 2 à la borne puis le plus gros à la voiture. J’entends un clic signalant le verrouillage de la prise de l’utilitaire. Au tableau de bord, un message m'indique le temps nécessaire pour recharger la batterie à 100 %.
Afin de stopper la charge, je me rends tout simplement sur l’application mobile et appuie sur « arrêter la charge » en prenant soin d’inscrire le code de sécurité. La trappe de la borne et celle de la voiture se déverrouillent.
Une place publique réservée, mais à quel prix !
Lors de l’essai comparatif, j’ai sillonné trois départements afin de recharger l’un des véhicules utilitaires. La majorité des villes et villages, sur mon passage, propose une place de parking avec une borne de recharge. Toutefois, le calcul de la tarification de recharge est différent pour chacune des communes.
En Picardie, le prix dépend de l’énergie délivrée et du temps de branchement, soit 0,16 €/kWh entamé et 0,01 €/min. Entre 23 heures et 6 heures du matin, la facture plafonne à 9 €. Dans le Val-d’Oise, la recharge est facturée uniquement sur le temps de charge, à savoir 3 € pour 4 heures puis 2 € par heure supplémentaire. En Seine-et-Marne, une charge de 3 heures coûte 2 € puis 0,025 € par minute supplémentaire.
Le câble fait la différence
En chargeant sur les bornes publiques, non équipées de câble de recharge, les différents véhicules mis à notre disposition pour l’essai n’emmagasinent pas la même quantité de kilowattheures. En effet, les câbles fournis par les différents constructeurs ne sont pas de capacités identiques. Le plus dimensionné autorise la charge du véhicule à hauteur de la puissance délivrée par la borne, tandis qu’un modèle sous-dimensionné bride la capacité du courant, augmentant alors le temps de charge.
Toutefois, le câble n’est pas l’unique responsable des variations de puissance. Certaines bornes proposent une prise limitée à 7 kWh, tandis que d’autres peuvent grimper à 18 ou 22 kWh. En outre, lorsque deux véhicules sont branchés à la même borne publique, le débit est divisé par deux.
Deux types de motorisation
Plusieurs technologies de motorisation électrique existent sur le marché : le moteur dit « synchrone » et celui dit « asynchrone ». Le rotor du premier dispose d'un aimant permanent, et le second, plus classique, d'un bobinage. Dans les deux cas, les moteurs sont alimentés via une électronique de puissance au niveau du stator par des courants de tensions et des fréquences variables. Les champs magnétiques formés génèrent la rotation. Dans le cas d’un moteur asynchrone, le stator active la rotation du rotor avec un léger décalage. La vitesse du champ magnétique tournant sera ainsi supérieure à celle du rotor.
La motorisation synchrone est préférée par l'industrie automobile. Sa plage de meilleur rendement, entre 2 000 et 9 000 tours, est bien adaptée à une conduite routière. Les moteurs asynchrones, pour leur part, tournent plus rapidement. Leur fabrication présente cependant l'avantage de ne pas avoir à extraire des terres rares, nécessaires à l'élaboration des aimants permanents présents dans les moteurs synchrones. Celles-ci proviennent quasi exclusivement de l'industrie minière chinoise.
Un couple moteur immédiat
Le véhicule électrique est principalement réputé pour sa disponibilité en couple moteur maximal dès la première rotation de celui-ci jusqu’à son régime maximal (de 1 à 10 000 tr/min). Au démarrage, les roues de la voiture peuvent immédiatement mobiliser de l’énergie pour se mettre en rotation.
Le moteur électrique reçoit simplement une circulation d’électrons, contrairement à un bloc thermique qui, lui, a besoin de temps pour que le mélange air/carburant brûle et se dilate dans les cylindres afin d'atteindre le rendement maximal.
Un large choix de recharges domestiques
La recharge gratuite
Rien de plus simple : le véhicule se branche sur la prise domestique de 220 V (8 A) pour une recharge à hauteur de 1,8 kWh (1). La charge complète de 0 à 100 % s’effectue en 31 heures pour une batterie de 50 kWh. Cette solution de recharge, ne nécessitant pas d’installation électrique spécifique en amont, est dite « gratuite ».
La recharge renforcée
La prise Green’up (2) ou renforcée de 16 A, installée au domicile par un électricien, autorise la recharge complète du véhicule en 15 heures à hauteur de 3,7 kWh pour une batterie de 50 kWh. Sa mise en place représente un coût de 200 à 300 €.
La charge en triphasé
Les exploitations dotées d’une installation électrique en triphasé peuvent s’équiper d’un transformateur de recharge, plus communément appelé « la Wallbox » (3). Celle-ci se décline en deux modèles délivrant 11 kW (32 A) ou 22 kW (32 A). Le premier autorise la recharge complète d’une batterie de 50 kWh en 5 heures, et le second en 2 heures 30. Pour profiter pleinement de cette puissance de charge, le véhicule doit être équipé d’usine de l’option chargeur embarqué. Les infrastructures non équipées d’un réseau triphasé pourront installer, en monophasé, la Wallbox 7,4 kW (32 A) permettant la recharge complète d’une batterie de 50 kWh en 7 heures 30. Ces installations représentent un investissement de 600 à 1 600 €. Toutefois, les aides de l’État « droit à la prise » peuvent diminuer la facture finale.
80 % de charge en 30 min
Tous les véhicules électriques dotés du système de régulation thermique de la batterie et de la connectique Combo (CCS) ou CHAdeMO peuvent se brancher sur un superchargeur délivrant un courant continu de 100 kW. Une batterie de 50 kWh emmagasine alors 80 % de charge en 30 minutes.
Ces transformateurs électriques de forte puissance sont onéreux (environ 50 000 €) et uniquement disponibles sur le réseau public. Ils sont le plus souvent présents sur les grands axes routiers comme l’autoroute, assurant un complément de recharge rapide lors d’un grand trajet.
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